Subtitle
Le 7 avril 1999 se déroulait sur le site de Kibeho la cinquième commémoration du génocide des Tutsi au Rwanda. Lors de son discours, le président de la République, Pasteur Bizimungu, accusa publiquement Mgr Misago, évêque de Gikongoro, d'avoir participé au génocide en déclarant : « Si l'Église regrette les briques et les vitres qui ont servi à la construction de cette église, l'État rwandais voulant en faire un mémorial, que l'Église nous le dise et nous construirons un autre bâtiment ». Ce moment de tension apparaissait révélateur des débats concernant les questions mémorielles : que faire des sites de massacres ? Fallait-il les réhabiliter ou les transformer en sites commémoratifs ? Cette interrogation se posait plus particulièrement pour les bâtiments publics (écoles, mairies, hôpitaux) et les édifices religieux (églises catholiques et protestantes, mosquées). En quels espaces mais aussi sous quelles formes la mémoire du génocide devait-elle se construire ? Enfin, par quels acteurs la politique commémorative devait-elle être initiée et pour qui ? Les survivants ? La nation tout entière ?
Abstract
In three decades, Rwanda has adopted a particularly ambitious memory policy throughout the territory. The story of this "early memory" reports on local, national and international political issues in the aftermath of the genocide of the Tutsi in Rwanda. It is embodied in specific moments, spaces and specific commemorative forms with the display of human remains. This article offers an overview of these memorial developments in Rwanda since 1994.