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7 mars 2024
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Le colonel Vincent, chef de la coopération technique militaire belge, incrimine les Hutu opposés aux accords d'Arusha, dont le colonel Nsabimana, pour l'attentat contre l'avion d'Habyarimana

Numéro : 563
Date : 6 mai 1994
Auteur : Artiges, Guy
Titre : Audition d'André Vincent, colonel CTM
Source : Auditorat militaire belge
Fonds d'archives : VdM
Résumé : Selon le colonel Vincent, l'attentat du 6 avril 1994 était un complot fomenté par des extrémistes hutu, militaires compris, et dont la tête pensante était le général Nsabimana. Le Président Habyarimana en connaissant l'existence, il aurait obligé ce dernier à monter à bord de son avion. L'attentat était destiné « à couler les accords d'Arusha. Pour les extrémistes, ces accords signifiaient à moyen terme la prise de pouvoir par les Tutsis ».
Commentaire : Le colonel Vincent est le chef de la coopération militaire belge et l'antenne locale du SGR, le service de renseignement militaire belge. C'est un tenant de la politique traditionnelle de soutien aux Hutu que les Belges ont mis au pouvoir à partir de novembre 1959. Il est étonnant qu'il ait été surpris par l'attentat. Il était en vacances en Tanzanie. Son allégation que l'attentat aurait été fomentée par le chef d'état-major Nsabimana est fausse. Celui-ci en a été victime. S'il était un dur, il n'était pas membre de l'Akazu et, selon Jean Birara, il se serait opposé au massacre d'opposants projeté par Habyarimana. C'est Bagosora qui l'a fait monter dans l'avion pour remplacer le ministre de la Défense Augustin Bizimana, selon le rapport Mutsinzi. En revanche le reste de la déposition semble tout à fait exact. L'attentat était destiné « à couler les accords d'Arusha. Pour les extrémistes, ces accords signifiaient à moyen terme la prise de pouvoir par les Tutsis ». Il confirme, mais en les adoucissant, les propos tenus lors d'un dîner chez lui par les colonels Nsabimana et Kabiligi selon lesquels « Arusha ne se ferait pas ». Vers le 15 mai, le major Aloys Mutabera, commandant du bataillon artillerie de campagne, entraîné par les Français, explique à Vincent « qu'ils devaient appliquer la solution finale ».
Citation: Ce jourd’hui six mai mil neuf cent nonante-quatre , à 0855 heures; Nous soussigné(s) Artiges Guy, adjudant - OPJ de gendarmerie, en résidence a Bruxelles - Aud.Mil. en tenue civile, (1) rapportons nous être rendu au quartier Reine Elisabeth à Evere où nous avons rencontré et entendu, aux date et heures du présent : Vincent André, Jules, Alex né à Ixelles le 07.10.41 dlié Chemin du Pachy 10 à 1328 Lasne Colonel - matricule 94689 - Chef de Mission CTM au Rwanda. qui nous déclare : "Je désire m'exprimer en langue française. Au niveau de l'attentat contre l'avion Présidentiel Rwandais, aucun bruit n'a couru avant. Ce fut une surprise pour tout le monde. Après, une info m'a été communiquée par le Directeur SGP Rwandais (Société Générale des Pétroles) à Mwanza (Tanzanie). Il s'agissait bien d'un complot fomenté par des extrémistes Hutus, militaires compris et dont la tête était le général Nsabimana. Selon la même personne, le Président Habyarimana connaissait l'existence du complot et, sachant qui en était la tête pensante, l'aurait obligé de monter à bord de son avion. Le Président se serait également fait accompagner par le Président Burundais pour éviter un attentat. Ma conviction intime est qu'il s'agit bien d'une affaire Rwando-Rwandaise destinée à couler les accords d'Arusha. 1ère suite au PV n° 652 dd 06.05.94 Det Jud Bruxelles Pour les extrémistes, ces accords signifiaient à moyen terme la prise du pouvoir par les Tutsis. Ils n'en voulaient absolument pas. A ma connaissance ni les FAR ni le FPR n'avaient de missiles sol-air. Comme armes individuelles les FAR avaient des AK 47 chinois, des FAL, des R4 Sud-Africains et des G3 Allemands. Pour ce qui est des baïonnettes, elles sont traditionnelles sauf pour 1e fusil chinois qui comporte une baïonnette-clou incorporée. En ce qui concerne la radio des 1000 Collines, je peux dire qu'elle est à labase du sentiment anti-belge. La campagne anti-belge a débuté vers La fin novenbre 93. Je n'ai jamais rencontré Ruggiu qui, semble-t-il, était très discret et évitait nos contacts. Pour ce qui est de l'assassinat de nos 10 paras je ne sais rien vous dire vu qu'à l'époque j'étais en Tanzanie. Je confirme les propos du Lt-Co1 Beaudoin, en ce sens que le Général Nsabimana et d'autres hauts militaires assuraient qu'Arusha ne se ferait pas et qu'ils étaient prêts à contrecarrer toute action du FPR. Sur l'aéroport, vers le 15.04.94, j'ai eu une discussion avec le major Mutabera qui m'a clairement dit qu'il fallait les comprendre, qu'ils devaient appliquer la "solution finale". Il m'a dit cela suite au fait que je lui disais qu'internationalement ces massacres n'allaient pas les aider. J'ajoute aussi que le sentiment anti-belge a été développé par ceux qui ne voulaient pas d'Arusha. Ils voulaient donc le départ de la MINUAR pour avoir les mains libres. Arusha représentait pour eux la prise du pouvoir par les Tutsis. Je ne vois rien d'autre à dire pour l'instant. (après lecture, persiste et signe dans notre carnet de renseignements) Dont acte,

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