Résumé
L'objet de cet article est de réexaminer la question de la complicité de la France dans le génocide des Tutsi au Rwanda au regard du droit international, en se fondant notamment sur les rapports de la « Commission Duclert » de 2021 et du Parlement français de 1998 sur le rôle de la France au Rwanda entre 1990 et 1994. L'article revient d'abord sur les notions de responsabilité et de complicité en droit international, à la lumière de la jurisprudence du Tribunal pénal international pour le Rwanda et de la Cour internationale de justice. L'article revient notamment sur l'arrêt Bosnie c. Serbie de la Cour internationale de justice qui adopte une vision restrictive de la notion de complicité mais établit également une obligation de prévention et de répression des génocides aux termes de la Convention pour la prévention et la répression du crime de génocide de 1948. Ensuite, l'article examine en détail les rapports Duclert et du Parlement. Même si la France n'était pas présente sur le terrain entre avril et juin 1994 et a soutenu les accords de paix d'Arusha d'août 1993, la France disposait, par sa présence militaire entre 1990 et 1993, d'une capacité d'influence importante sinon décisive, et d'une connaissance des crimes commis contre les Tutsis pendant cette période. Par ailleurs, lors de l'opération Turquoise entre juin et août 1994, la France n'a pas agi pour remplir son obligation de punir les auteurs de génocide.