Résumé
Le discours de haine médiatisé a alimenté le génocide contre les Tutsis au Rwanda il y a près de trois décennies, mais la rhétorique anti-tutsi circule toujours dans la région des Grands Lacs, bien que le paysage médiatique et politique ait radicalement changé. Les médias sociaux et les plateformes en ligne facilitent la prolifération de discours incendiaires et discriminatoires dont l'impact sur les conflits violents reste incertain. Cette étude examine le phénomène en se concentrant sur les discours de haine anti-Banyamulenge et anti-Tutsi dans le contexte de la résurgence d'un conflit armé violent dans les hautes terres de la province de l'Est du Sud-Kivu en République démocratique du Congo (RDC). Il explore d'abord l'histoire des Banyamulenge en RDC, mettant en évidence les contestations de leur identité et de leur appartenance ainsi que leurs expériences et leur position dans le cycle actuel de conflits atroces. Il documente et analyse ensuite le contenu des discours de haine et des théories du complot circulant dans des messages audio, vidéo et papiers en plusieurs langues, et identifie les acteurs impliqués dans leur diffusion. L'analyse dévoile comment les plateformes de médias sociaux facilitent les interactions entre divers acteurs, y compris les chefs de groupes armés, les fonctionnaires et les communautés de la diaspora. Il soutient que de nouveaux réseaux transfrontaliers d'identité émergent où des récits haineux et des théories du complot sont créés, raffinés et diffusés à un public plus large. Ces réseaux qui se renforcent eux-mêmes diffusent des discours nativistes incendiaires, des sentiments anti-tutsi, un langage déshumanisant et des appels au génocide allant du terrain mondial au terrain local.