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Mise à jour :
3 août 2023 Anglais

Un ex-major des FAR : « J'ai l'impression qu'on a été abandonné par les Français. Toutes les armes que nous avions, c'était de fabrication française et c'est par les Français qu'on pouvait avoir des munitions »

Fiche Numéro 3561

Numéro
3561
Auteur
Bromberger, Dominique
Auteur
Rybinski, Gauthier
Auteur
Joachim, Manuel
Date
26 juillet 1994
Amj
19940726
Heure
20:00:00
Fuseau horaire
CEST
Surtitre
Journal de 20 heures [7:52]
Titre
Un ex-major des FAR : « J'ai l'impression qu'on a été abandonné par les Français. Toutes les armes que nous avions, c'était de fabrication française et c'est par les Français qu'on pouvait avoir des munitions »
Soustitre
Les anciennes Forces armées rwandaises n'ont pas été totalement désarmées en quittant le Rwanda.
Nom fichier
Taille
21624551 octets
Source
TF1
Fonds d'archives
INA
Type
Journal télévisé
Langue
FR
Résumé
- Quelques lueurs d'espoir au Rwanda : pour la première fois, le Haut-Commissariat aux réfugiés fait état d'un léger mieux dans la situation à Goma. Deux énormes systèmes de purification de l'eau ont été apportés par les Américains. La coordination des secours s'organise. 35 vols ont été réalisés aujourd'hui et les camions-citernes commencent à arriver.
- Un problème cependant ne sera pas réglé par les voies humanitaires : c'est celui de la présence encombrante des forces armées de l'ancien régime rwandais.
- Armée perdue, armée déboussolée, les anciennes Forces armées rwandaises ont vu se retourner contre elles le malheur auquel elles ont participé. Dans un camp près de Goma, leur état-major s'est regroupé et tente, par une activité paperassière digne du temps des colonies, de faire contre mauvaise fortune bon cœur. Ils n'ont pas été totalement désarmés en quittant le Rwanda, mais ce n'est pas une armée de fanatiques.
- S'ils gardent aujourd'hui l'uniforme qui les distingue des autres réfugiés, c'est dans l'espoir de toucher une hypothétique solde que leur a promise le tout aussi hypothétique gouvernement rwandais en exil. Malgré tout, ils ont leur fierté. Ils n'ont pas complètement abandonné l'idée de reprendre le combat. Lieutenant-colonel Marcel Bivugabagabo : "S'il faut retourner au Rwanda par la force, nous le ferons. Ce serait dommage mais nous n'hésiterons pas". Major Debihora [?] : "J'ai l'impression qu'on a été abandonné par les Français. C'est mon sentiment. Et c'est le sentiment de plusieurs de nos militaires. Toutes les armes que nous avions, c'était de fabrication française et c'est par les Français qu'on pouvait avoir des munitions".
- Interview du général Jean-Claude Lafourcade par Dominique Bromberger : Dominique Bromberger : - "Des incidents ont opposé des soldats français aux miliciens hutu hier [25 juillet] et avant-hier [24 juillet] et les Français ont utilisé leurs armes au cours de ces incidents. De quoi s'agit-il exactement ?". Jean-Claude Lafourcade : - "Dans le mandat que nous a confié l'ONU, nous avons la mission d'assurer la sécurité dans la Zone humanitaire sûre. Et c'est dans le cadre de cette mission que nous interdisons à tout élément armé, quel qu'il soit, qui sont souvent des jeunes déserteurs ou miliciens qui essaient de commettre quelques exactions ou quelques pillages sur les populations. Nous essayons de leur interdire ces actions et nous les neutralisons. C'est tout à fait dans le cadre de notre mandat. […] Actuellement la Zone humanitaire sûre que nous contrôlons est en totale sécurité puisqu'actuellement de nombreux convois humanitaires venant de Bujumbura rentrent dans la zone pour servir leur aide humanitaire sur les populations déshéritées qui sont environ un million et demi dans ma zone". Dominique Bromberger : - "Est-ce que vous avez eu des incidents du même genre avec les Forces armées rwandaises, avec l'ex-armée régulière ?". Jean-Claude Lafourcade : - "Non, avec les Forces armées rwandaises, nous avons appliqué à l'intérieur de la zone humanitaire la réglementation prévue dans cette zone, c'est-à-dire qu'aucun élément armé n'a circulé dans cette zone. Nous avons désarmé les gens qui s'y trouvaient. Concernant les soldats FAR qui sont réfugiés au Zaïre, je dirais que ce sont finalement, actuellement, des réfugiés un peu comme les autres. Ils se sont regroupés avec leurs familles et ne sont pas en état de combattre. D'autant plus que les Zaïrois ont ramassé toutes les armes. Et je peux dire qu'il n'y a aucune arme actuellement avec les soldats des Forces armées rwandaises réfugiées au Zaïre". Dominique Bromberger : - "Vous avez lancé un appel à l'aide très émouvant, hier [25 juillet], pour le ramassage des morts. Les Français sont-ils les seuls à procéder à cette tâche ?". Jean-Claude Lafourcade : - "Effectivement, j'ai lancé cet appel parce que la tâche est immense ! Nous sommes avec l'association Caritas les seuls pratiquement à nous occuper de ce problème. Certes il faut soigner les gens dans les camps. Certes il faut leur amener de la nourriture. Mais si nous laissons ces cadavres éparpillés dans tous les environs de Goma, nous risquons des épidémies énormes qui mettront à néant le travail de toutes les organisations humanitaires sur le terrain ! Et j'en profite pour rendre un hommage appuyé à tous mes soldats qui font une tâche ingrate et difficile à ramasser tous ces morts, souvent dans des conditions atroces, grâce à leur dévouement et à leur courage que je qualifie d'exemplaire. Et nous pouvons être fier d'eux". Dominique Bromberger : - "Est-ce que la coordination avec les autres, notamment avec les Américains, s'organise mieux maintenant ?". Jean-Claude Lafourcade : - "On ne peut que se féliciter de voir les Américains engager toute leur puissance logistique au service des problèmes humanitaires de cette région. Je dois dire que ça se passe de la meilleure façon dans la mesure où les Américains ont compris que la plateforme de Goma avait des possibilités limitées et que ce n'est pas à partir de Goma que nous pourrons acheminer tout le formidable effort logistique nécessaire pour cette opération humanitaire. Une autre plateforme sera choisie, qui permettra d'amener de nombreux avions américains au profit de cette action humanitaire". Dominique Bromberger : - "Est-ce que votre mission pourrait être ensuite d'aider au retour des réfugiés dans leur pays ?". Jean-Claude Lafourcade : - "Nous avons déjà commencé à le faire. Dans la Zone humanitaire sûre, nous avons reconduit 60 000 personnes déplacées vers l'Est du Rwanda. Et je pense que c'est la solution si nous voulons régler le problème humanitaire dans cette région du monde. Il faut que tous ces déplacés, tous ces réfugiés rejoignent leurs champs, rejoignent leurs maisons où ils trouvent leur sécurité et des conditions pour reprendre une existence normale. Ce n'est pas en les nourrissant à l'extérieur, en les nourrissant dans des camps que nous règlerons ce problème. Et je suis convaincu qu'on peut y parvenir".